Lors d’un précédent épisode, nous faisions état de ce sympathique aven livrant des remplissages fauniques de la fin du Pléistocène ; il est contemporain de l’Igue du Gral, localisé à une vingtaine de kilomètres au nord. A la suite de trois courtes campagnes de 2022 à 2024, plus de 2200 vestiges ont été déterminés et contribuent à la caractérisation des paléo-environnements des animaux au cœur du Quercy lors de la dernière glaciation. Le nombre d’individus atteint désormais 14 pour le renne, 6 pour le cheval, 5 pour le bison et un individu unique pour le loup et le cerf. Le site livre aussi de la faune très récente composée d’animaux domestiques (moutons), de petits carnivores (renard, blaireau, fouine) et de léporidés (lièvres et lapins).

A la suite de la campagne de 2024, plusieurs arguments nous conduisent à interrompre cette opération.
Le principal argument est une bête question de rentabilité ! En effet, la partie la plus intéressante de l’opération se déroule dans une galerie étroite dans laquelle une seule personne peut travailler. Cette diaclase elle est très riche mais le nombre de vestiges découverts par semaine de travail est forcément modeste par rapport à une fouille classique où le nombre de fouilleurs peut être beaucoup plus élevé. Pour le responsable d’opération, les résultats scientifiques par campagne de terrain sont donc beaucoup plus limités.

De plus, à l’issue de la campagne de 2024, nous avons mieux compris la disposition des différents remplissages de la cavité et l’origine des faunes pléistocènes conservées. Nous descendons dans la cavité par un puits étroit qui n’est pas celui dans lequel les animaux de la dernière glaciation sont tombés. Le puits dans lequel ces derniers ont chuté se trouve à l’extrémité de la diaclase. Il est entièrement comblé et invisible depuis la surface. Par conséquent, pour obtenir de meilleurs résultats, il faudrait reprendre la fouille depuis le haut.
Enfin, comme dans tous les sites avec un accès vertical, il devient excessivement difficile administrativement d’emmener des étudiants sous terre. Ce n’est pas que le site soit plus dangereux pour des étudiants que pour des spéléologues mais la gestion du risque doit suivre des protocoles de plus en plus lourds. Fouiller avec des spéléologues formés à la paléontologie devient préférable mais ces derniers ne sont pas toujours disponibles pour un travail minutieux de longue haleine. Il est dommage que les étudiants n’aient plus la chance de découvrir ce genre de milieu, moins confortable mais tellement formateur ! Avec un accès depuis l’extérieur cela résoudrait le problème.
Cette fouille aux résultats modestes nous apporte toutefois des renseignements intéressants sur les faunes présentes au cœur du Quercy. Le premier enseignement pourrait être qu’elles sont moins diversifiées qu’à l’Igue du Gral à la même époque, mais cette observation doit être discutée davantage par les spécialistes des paléo-environnements du passé.
Au cours de ces trois années, nous avons eu la joie d’accueillir de nombreux étudiants suisses et français (dûment encadrés par des spéléologues experts) qui ont pu se former à la fouille dans des environnements complexes. Les recherches sur ces problématiques ont été transférées à l’Igue de Rahan, localisée à moins de 2km qui livre des faunes contemporaines. Cet aven est plus facilement sécurisable et permet la fouille simultanée de plusieurs personnes, ce qui permet des progrès de la connaissance plus rapide.

L’analyse des faunes de l’Igue des Sirènes vient de commencer ; cette fouille fera donc l’objet d’une publication de synthèse d’ici deux ans.