Une opération dirigée par J.-C. Castel (Muséum de Genève) et Mathieu Luret (Université de Genève)

La Cave aux Endives est un gisement paléontologique remarquable qui nous a permis de récolter une grande quantité d’os bien conservés.

Il s’agit de mammifères tombés dans un gouffre sans intervention humaine. Ce gisement est composé de deux couches principales qui livrent des assemblages de faunes assez différents. Dans la couche du dessus, les espèces principales sont le renne, le cheval, le bison et le cerf. Il y a aussi de rares os de loup et de lièvre. Cet ensemble est daté autour de 30.000 ans. En dessous, se trouve une couche épaisse de 50 cm au moins que nous avons nommé le magma de bison tellement les os sont à touche-touche. La datation n’est pas encore bien assurée mais elle est antérieure à 40.000 ans. La base du remplissage paléontologique n’est pas encore connue.

Exemple de matériel récolté en 2019 : fémurs de bison
Restauration de l’un des fémurs
Tibia de lion des cavernes
Patte de cheval

Le site a été découvert par des spéléologues en 2003. Il s’agit en fait d’une partie du gisement originel qui s’effondre progressivement dans une rivière souterraine qui le sape à sa base. Un effondrement en 2013 nous a permis de récolter un quantité importante de vestiges dans l’éboulis qui en a résulté. Cela nous a incité à entreprendre une véritable fouille en 2019 afin de remettre un peu d’ordre dans tout le matériel récolté et par conséquent d’observer les différentes couches et de procéder aux premières datations.

Il est localisé sur le causse du Quercy (voir photos ci-dessous) qui est constitué de plateaux calcaires d’âge jurassique, pas très loin du gouffre de Padirac où se pressent des milliers de visiteurs. Cette région a livré près d’une centaine de pièges naturels dont quelques-uns ont pu être fouillés (les autres sont trop difficiles d’accès ou trop pauvres pour y conduire des recherches).

Le cirque d’Autoire
Notre gîte

L’accès par le lequel nous y accédons est un puits artificiel au milieu d’une doline.

Préparation avant la descente
Dans la doline, la buse d’accès et le groupe électrogène sous une bâche
La descente

Avec un équipement adapté et une bonne pratique de la spéléologie, on descend assez rapidement jusqu’à environ 25m. Le gisement, ou plus précisément, ce qu’il en subsiste est, d’un côté recouvert par un éboulis épais de 15m et de l’autre sapé par une rivière souterraine. Les conditions d’interventions sont donc délicates et exigent un encordement permanent.

La descente (suite)

Depuis le début de nos interventions prés de 800 os ont été récoltés. Les deux intérêts scientifiques principaux sont d’une part de permettre de documenter les caractéristiques biologiques d’une population de bisons et d’autre part de documenter la diversité des populations de mammifères à une période où la région du Quercy était fréquentée par des hommes préhistoriques qui ont laissé des traces de leurs modes de vies (alimentation : quelles espèces étaient chassées) et de leur univers spirituel (animaux peints ou gravés dans des grottes « sanctuaires »).

Les conditions d’accès, l’humidité, la boue et les fouilles à flanc de paroi impliquent une équipe très motivée et formée à la spéléologie en plus de la paléontologie et l’archéologie.

En arrivant le 28 juin 2020, nous avons eu la mauvaise surprise de constater qu’une nouvelle fois, une partie du gisement s’était effondrée. Toute la partie du haut à glissé sur une largeur de 2m… Pour un gisement d’environ 4m de long accessible cela fait beaucoup. La fouille de la couche supérieure sera donc plus réduite. Et pour fouiller le magma de bison et tenter d’atteindre la base de la séquence il faudra évacuer un épais mélange d’argile collante et de petits blocs.

Aspect de l’effondrement du gisement
Organisation des travaux de sécurisation et de dégagement des terrains encore en place
Vue du gisement depuis le milieu du puits

Cette opération nous a pris 5 jours et la fouille proprement dite a pu commencer le lundi 6 juillet. Pendant qu’une partie de l’équipe ôtait les sédiments encore accrochés au-dessus des couches, des fouilleurs ont réalisé des sondages le long de la rivière souterraine. Celle-ci n’atteint la galerie de base que lors de fortes crues et passe en fait dans un réseau encore plus profond quasiment inaccessible.

Sacrum de bison en train d’apparaître
Maxillaire de jeune cerf

Quelques os ont été récoltés dans l’éboulis mais en général ils sont fracturés ou même roulés et sont moins utiles aux analyses.

Les opérations de lavage ont commencé.

Lavage des ossements
Les premiers os lavés; ceux qui sont noirs ont été trouvés dans la rivière souterraine

Il y a un peu de gaz carbonique dans le bas des galeries mais rien d’inhabituel pour la région.

L’an dernier nous étions 8. Cette année, nous avons commencé à 4 fouilleurs et nous allons passer progressivement à 6. Entre les règles de distanciation et la taille de notre gîte, il ne sera pas possible d’être plus nombreux.

L’équipe du début du mois : Anaïs, Mathieu, Bruno, Gabriel
Jean-Christophe

 

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