Lorsqu’une météorite est au sol, elle a perdu l’information sur sa provenance dans le système solaire. Mais l’interaction entre un météore et l’atmosphère produit une trace lumineuse, bien visible pendant la nuit (une étoile filante), qui peut être enregistrée avec des caméras. En utilisant plusieurs caméras, il est ainsi possible de reconstruire la trajectoire de la chute, de calculer l’endroit où la météorite est tombée et ainsi de déterminer son origine dans le système solaire.

Les chutes de météorites observées en 2022

Malgré quelques soucis techniques des caméras installées dans le désert d’Oman, trois chutes de météorites, qui ont probablement atteint le sol, ont été enregistrées en 2022 (voir l’article sur MuséumLab « Des caméras pour enregistrer les chutes de météorites en Oman »). La première d’entre elles est tombée au sud d’Oman dans l’Océan Indien, les deux autres sont tombées sur la terre ferme, et peuvent donc potentiellement être retrouvées.

Image satellite (GoogleEarth) montrant la trajectoire lumineuse de la chute de la météorite (de gauche à droite au-dessus de l’océan) de février 2022. La météorite est tombée dans l’Océan Indien au sud d’Oman, près des ‘îles Khuria Muriya. Les lignes blanches indiquent les enregistrements par les deux caméras.

Le projet « Flux of small meteorite »

Le but principal de notre projet financé par le Fonds National Suisse (collaboration entre les Muséums d’histoire naturelle de Berne et de Genève, et l’Université de Berne) est de mesurer les composants formés dans une météorite à la suite des interactions avec les rayons cosmiques pendant son séjour dans l’espace. Les signaux mesurés sur ces composants qui se désintègrent au fil du temps sont plus forts si l’analyse de la météorite est effectuée juste après sa chute. Certains des composants permettent également de dater la chute de la météorite, et ainsi de prouver qu’elle appartient bien à la chute observée par les caméras.

Traces de recherches systématiques à pied (surface bleue) et en voiture (surface brune) pour trouver les météorites de la chute de mars 2022. Les lignes en bleu clair indiquent les endroits calculés à partir des observations par les caméras des lieux où devraient se trouver les météorites en fonction de masses différentes (AUS : calculs par Curtin University, Perth, Australie ; Booz : calculs par Beat Booz, Berne, Suisse). Les deux diamants rouges montrent les localités où nous avons trouvé les deux météorites.

Les météorites de la chute du mars 2022

Les recherches pour trouver la météorite de la chute du 8 mars 2022, observée par les caméras, ont été conduites par un groupe de 7 chercheurs suisse et omanais. Marchant côte à côte à une distance de 10 m les uns des autres, la région où la météorite était très probablement tombée a été systématiquement prospectée pendant trois jours. Deux météorites fraîches de 13 et 7 grammes, ainsi qu’une météorite fortement altérée n’appartenant pas à la chute observée ont été découvertes. De retour en Suisse, Anna Zappatini, doctorante sur ce projet, a placé la météorite de 7 grammes dans un spectromètre gamma installé dans le tunnel sous La Vue-des-Alpes situé dans le canton de Neuchâtel, afin d’analyser les minuscules quantités de composants radioactifs produits par les rayons cosmiques dans la météorite. Grâce à cette méthode non-destructive, la mesure du manganèse-54, dont la moitié de ce composant se désintègre en seulement 312 jours (sa demi-vie) confirme que cette météorite correspond à la chute observée par les caméras.

Météorite 23-0010 pesant 13.3 g et montrant une croûte de fusion fraîche et craquelée. La forme indique qu’il s’agit d’une météorite orientée, c’est-à-dire qu’elle est restée dans une position stable pendant sa traversée de l’atmosphère, comme une capsule spatiale qui ramène des astronautes sur la Terre.

Les météorites de la chute d’avril 2022

Les caméras qui enregistrent les traces lumineuses de chutes de météorites prennent de manière continue des photos de 27 secondes de temps de pose. Entre chaque prise, trois secondes sont nécessaires pour l’enregistrement de l’image. Comme la trainée lumineuse a duré 10 secondes, le début a été enregistré sur une photo et la fin sur la suivante, avec une coupure apparente au milieu. Le même groupe des 7 chercheurs suisse et omanais a conduit les recherches pour retrouver les météorites de cette seconde chute. Dans ce cas, les incertitudes dans les calculs pour définir la surface où la météorite devait être tombée était beaucoup plus grandes en comparaison avec la chute de mars. De plus, une partie de la région est couverte de dunes de sable, rendant plus difficile la découverte de ces petits objets. Un jour où nous cherchions les météorites sur les dunes, le vent soufflait et nous avons tenté une petite expérience : nous avons placé une pierre noire sur une dune et constaté qu’en moins d’une heure, elle s’était fait complètement ensevelir par le sable. Il est donc bien possible que la plus grande pièce de cette chute se cache encore quelque part dans le sable. Malgré ces difficultés, nous avons trouvé deux petites météorites de 4.8g et 41.9g qui pourraient appartenir à cette chute. Ceci sera à vérifier avec le spectromètre gamma.

Ces premières découvertes de météorites grâce à l’enregistrement des traces qu’elles ont laissé dans le ciel est très prometteur pour la suite du projet.

Terrain plat et clair, idéal pour une recherche systématique avec plusieurs personnes. La distance entre les personnes est de 10 mètres.
La plus petite météorite de 4.8 g trouvée dans la région de la chute d’avril 2022.

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