Chercher des météorites sur Terre pour en extraire des informations sur la formation de notre système solaire est beaucoup moins cher que d’aller chercher ce matériel dans l’espace par une mission spatiale. Cependant, lorsque la météorite est au sol, elle ne porte plus l’information sur sa provenance dans le système solaire.

L’atmosphère de la Terre n’a pas seulement pour effet de freiner un météore arrivant de l’espace avec une vitesse supersonique, mais l’interaction entre le météore et l’atmosphère produit une trace lumineuse, qui est bien visible pendant la nuit (une étoile filante) et peut être enregistrée avec des caméras. En utilisant plusieurs caméras, il est ainsi possible de reconstruire la trajectoire de la chute, de calculer l’endroit où la météorite est tombée et de déterminer son origine dans le système solaire. Dans le meilleur des cas, la météorite retrouvée va permettre d’établir un lien entre sa nature et son origine.

« Oman Météorites Monitoring Projet »

Le but principal de notre projet financé par le Fonds National Suisse (collaboration entre les Muséums de Berne et de Genève, et l’Université de Berne) est de mesurer les composants formés dans une météorite par son interaction avec les rayons cosmiques lors de son séjour dans l’espace. Comme certains des composants de cette interaction se désintègrent rapidement, il est important d’analyser une météorite rapidement après sa chute. Un système de caméras  pour observer des chutes de météorites est la meilleure approche pour obtenir des météorites fraîches.

On peut bien s’imaginer qu’une météorite n’est pas facile à trouver en Suisse, où le paysage est couvert de végétation et où le relief ne permet souvent pas une recherche efficace.  De plus, le couvert nuageux empêche souvent l’observation du ciel, diminuant le temps d’observation.

C’est pour cette raison que les quatre caméras obtenues d’Australie pour ce projet n’ont pas été installées en Suisse, mais en Oman. En se basant sur vingt ans d’expérience de terrain dans ce pays, les quatre sites ont été sélectionnés dans les régions où le ciel est rarement couvert, où le sol est plat, sans végétation et d’une couleur claire. Il sera donc facile de retrouver une météorite rapidement après sa chute.

Image satellite (GoogleEarth) de la péninsule arabique montrant les quatre localités (étoiles rouges) choisies pour placer les caméras en Oman. Les surfaces colorées en violet et vert montrent les régions couvertes par plusieurs ou seulement deux caméras.

Comment fonctionne l’observation du ciel ?

Les caméras permettent d’enregistrer les traces lumineuses de chutes de météorites. Elles fonctionnent pendant la nuit, en prenant de manière continue des photos de 30 secondes d‘ouverture. En même temps, un obturateur électronique interrompt l’image, produisant ainsi des coupures dans les trainées lumineuses. Couplées avec un signal horaire du GPS et enregistrées par différentes caméras, ces données permettent de calculer la trajectoire du météore, sa vitesse initiale, sa décélération pendant le passage dans l’atmosphère, et son origine dans notre système solaire. Pour savoir où la météorite est tombée selon sa trajectoire lumineuse, il faut encore considérer les vents d’haute altitude dans les calculs.

Caméra australienne utilisée en Oman. Ce type de caméra est bien adapté aux conditions désertiques. Chaque unité contient une caméra photographique standard (grande lentille noire au centre), une caméra vidéo (petite lentille noire), un petit ordinateur (à l’intérieur de la boîte blanche) et un GPS (bouton noir, à gauche). La plaque métallique protège la boîte du soleil.

Les travaux de terrain

En raison de la situation sanitaire, il n’était pas possible pour l’équipe suisse de travailler en Oman en 2021. Ce sont deux collègues omanais qui se sont occupés de l’installation de trois caméras. La quatrième caméra est arrivé seulement pendant nos travaux de terrain en février 2022. Comme une caméra installée ne donnait plus de signal et le champ de vision d’une deuxième caméra était partiellement obstrué, nous avons visité les quatre localités pour nous faire une image claire de la situation. Les images prises par les caméras avant nos travaux de terrain ont permis de réfléchir à des améliorations pour optimiser la vue des caméras. A la fin de notre mission de terrain, trois caméras fonctionnaient,  mais il était nécessaire de désinstaller une caméra pour l’emmener à Muscat et la réparer avec l’aide à distance. Elle a été réinstallée depuis.

Hussain Al-Ghafri photographiant le socle construit pour surélever la caméra afin d’éviter qu’une partie de l’image soit obstrué par la couronne du tour. Le panneau solaire fournit l’électricité pour la caméra.
Beda Hofmann (à droite) et Urs Eggenberger en train de contrôler le positionnement de la quatrième caméra après son installation.

La première chute

Dans la nuit du 25 février, juste après notre retour, une chute de météorite d’environ 2 kg a été enregistrée. Malheureusement elle est tombée dans l’Océan Indien. Mais une deuxième chute vient d’être signalée, et celle-ci est bien tombée sur la terre ferme. Il n’y a plus qu’à retrouver la météorite…  La suite au prochain numéro !

Trainée lumineuse enregistrée par une des caméras en Oman le 25 février 2022. Elle a été produite par la chute d’une météorite d’environ 2kg. Les interruptions irrégulières dans la trainée sont produites par la caméra pour mesurer la vitesse.

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