L’utilité des cavités
Depuis de nombreuses années, je suis une population de Chouettes hulotte Strix aluco au pied du Jura vaudois, où des nichoirs spécialement adaptés à ce gros rapace nocturne ont été disposés par des ornithologues amateurs.
Il arrive régulièrement que les nichoirs soient occupés par des insectes hyménoptères (Frelon européen Vespa crabro surtout, mais aussi Guêpe germanique Vespa germanica, Abeille mellifère Apis mellifera ou bourdon Bombus sp.), plus rarement par des mammifères (Fouine Martes foina, Martre des pins Martes martes, Écureuil roux Sciurus vulgaris, Chat forestier Felis silvestris) ou par d’autres espèces d’oiseaux (Sittelle torchepot Sitta europaea, Mésanges charbonnière Parus major ou bleue Cyanistes caeruleus, Pigeon colombin Columba oenas).
La plupart du temps on trouve le nid de ces espèces, mais c’est parfois l’animal bien vivant qui saute dans la filoche !
Martre des pins Martes martes dans un nichoir à Chouette hulotte Strix aluco, pied du Jura vaudois le 4.4.2021
Le HLM
Lors d’un contrôle des nichoirs le 4 avril 2021, j’ai eu la surprise de constater une occupation que je n’avais jamais observée auparavant.
D’abord, il a vite été constaté que le nichoir était occupé par un volumineux nid de frelon européen (les nids de frelons, généralement construits l’été précédent et donc vides au printemps, occupent le plus souvent le volume complet du nichoir, ce qui empêche bien entendu les chouettes hulottes de venir s’installer. Il faut donc les enlever). Je monte au nichoir avec mon échelle pour le retirer et je constate que le haut du nid a été picoré et qu’une mésange (charbonnière ou bleue) a commencé à y construire son nid fait de mousse.
En déblayant le fond du nichoir, je vois que les restes du nid de frelon effrité se mettent à bouger ! Un joli Muscardin Muscardinus avellanarius, un peu paniqué, sort du nichoir et grimpe aussitôt quelques mètres sur le tronc nu du hêtre où le nichoir est fixé. Son nid, une sorte de cigare fait de mousse et tapissé d’herbes sèches à l’intérieur, se trouve dans un coin du fond du nichoir. Je le laisse en place, espérant que le rongeur va revenir après le nettoyage.
Après de longues minutes, le Muscardin finit par réintégrer ses appartements !
À défaut de Chouette hulotte, ce nichoir, véritable HLM, contenait donc une superposition de trois nids de trois espèces différentes (Frelon européen, Mésange charbonnière ou bleue et Muscardin).
À la lumière de cette anecdote, on comprendra sans doute mieux l’utilité des cavités, naturelles ou artificielles, pour le maintien de la biodiversité.