L’utilité des cavités

Depuis de nombreuses années, je suis une population de Chouettes hulotte Strix aluco au pied du Jura vaudois, où des nichoirs spécialement adaptés à ce gros rapace nocturne ont été disposés par des ornithologues amateurs.

Disposition habituelle d’un nichoir pour Chouette hulotte Strix aluco
Disposition habituelle d’un nichoir pour Chouette hulotte Strix aluco, à environ 5 m de hauteur en forêt. Au printemps, les femelles sont capturées à l’aide d’une filoche et sont baguées, de même que les jeunes. Pied du Jura vaudois, 8.5.2019. L. Vallotton
Vision habituelle lors de l’ouverture d’un nichoir occupé par la Chouette hulotte Strix aluco (ici 3 poussins). La femelle a été capturée peu avant avec une filoche. Pied du Jura vaudois, 4.4.2021. L. Vallotton

Il arrive régulièrement que les nichoirs soient occupés par des insectes hyménoptères (Frelon européen Vespa crabro surtout, mais aussi Guêpe germanique Vespa germanica, Abeille mellifère Apis mellifera ou bourdon Bombus sp.), plus rarement par des mammifères (Fouine Martes foina, Martre des pins Martes martes, Écureuil roux Sciurus vulgaris, Chat forestier Felis silvestris) ou par d’autres espèces d’oiseaux (Sittelle torchepot Sitta europaea, Mésanges charbonnière Parus major ou bleue Cyanistes caeruleus, Pigeon colombin Columba oenas).

La plupart du temps on trouve le nid de ces espèces, mais c’est parfois l’animal bien vivant qui saute dans la filoche !


Martre des pins Martes martes dans un nichoir à Chouette hulotte Strix aluco, pied du Jura vaudois le 4.4.2021

Le HLM

Lors d’un contrôle des nichoirs le 4 avril 2021, j’ai eu la surprise de constater une occupation que je n’avais jamais observée auparavant.

D’abord, il a vite été constaté que le nichoir était occupé par un volumineux nid de frelon européen (les nids de frelons, généralement construits l’été précédent et donc vides au printemps, occupent le plus souvent le volume complet du nichoir, ce qui empêche bien entendu les chouettes hulottes de venir s’installer. Il faut donc les enlever). Je monte au nichoir avec mon échelle pour le retirer et je constate que le haut du nid a été picoré et qu’une mésange (charbonnière ou bleue) a commencé à y construire son nid fait de mousse.

Nid de Frelon européen Vespa crabro extrait du nichoir, surmonté par un nid de Mésange charbonnière Parus major ou bleue Cyanistes caeruleus. Pied du Jura vaudois, 4.4.2021. L. Vallotton

En déblayant le fond du nichoir, je vois que les restes du nid de frelon effrité se mettent à bouger ! Un joli Muscardin Muscardinus avellanarius, un peu paniqué, sort du nichoir et grimpe aussitôt quelques mètres sur le tronc nu du hêtre où le nichoir est fixé. Son nid, une sorte de cigare fait de mousse et tapissé d’herbes sèches à l’intérieur, se trouve dans un coin du fond du nichoir. Je le laisse en place, espérant que le rongeur va revenir après le nettoyage.

Nid de Muscardin Muscardinus avellanarius au fond d’un nichoir de Chouette hulotte Strix aluco. Au fond et contre les parois du nichoir, on voit les restes du nid de frelon Vespa crabro qui vient d’être enlevé. Pied du Jura vaudois, 4.4.2021. L. Vallotton

Après de longues minutes, le Muscardin finit par réintégrer ses appartements !

À défaut de Chouette hulotte, ce nichoir, véritable HLM, contenait donc une superposition de trois nids de trois espèces différentes (Frelon européen, Mésange charbonnière ou bleue et Muscardin).

À la lumière de cette anecdote, on comprendra sans doute mieux l’utilité des cavités, naturelles ou artificielles, pour le maintien de la biodiversité.

Après quelques minutes, le Muscardin Muscardinus avellanarius délogé finira par redescendre et revenir à son nid, laissé dans le nichoir après évacuation des débris. Pied du Jura vaudois, 4.4.2021. L. Vallotton

Laisser un commentaire